La pièce



SYNOPSIS
Dans un monde onirique deux orphelins entreprennent un long et pénible voyage vers une grande étendue d’eau où quelqu’un doit venir les chercher. Ils arrivent au point de rendez-vous, mais voilà personne à l’horizon. L’attente se fait longue…
Viendra-t-on les chercher ? Si oui, qui ?

Leur attente, leurs désillusions et leurs espoirs laissent place à des questions sur leur passé, leur présent et leur avenir.






LA PIECE
Une étoile Filante est un conte, où le rêve et la poésie ont une grande place, un conte obscur, voire inquiétant, s’approchant de l’esthétisme sombre de Tim Burton. La scénographie est quasiment vide, juste ce qu’il faut pour situer le lieu : quoi de plus angoissant qu’une plaine la nuit avec des bruits étranges dans les alentours. D’ailleurs, où sommes-nous vraiment ?
Il y a quelque chose de mystique là dedans ; la pièce se situe entre la comédie et la tragédie s’inspirant du mythe du Styx.
Les personnages, qui sont-ils ?
Tout d’abord Nino. Garçon solitaire et curieux, il aime étudier, ce qui ne l’empêche pas de vouloir partager son savoir à qui veut bien l’écouter. Nino est égocentré, et légèrement psychorigide.
Ensuite Venise. Fille hyperactive, elle s’ennuie très vite et se laisse facilement distraire. Nino est son seul point de repère, sans lui, elle est perdue. Chamailleries, disputes, réconciliations et re-chamaillerie, voilà le train-train habituel de ces deux personnages-là, comme tout bon frère et sœur




MISE EN SCENE
Depuis plusieurs années, j’avais en tête l’idée d’ « Une Etoile Filante ». L’histoire en elle-même était assez flou mais les personnages étaient bien dessinés: deux orphelins, Nino et Venise, frère et sœur. Après avoir monté « Caprice, un conte cauchemardesque grotesque », une parodie de conte, j’ai eu envie de monter un vrai conte pour enfant. Et c’est ainsi que je me suis lancé dans l’aventure d’« Une Etoile Filante ».

Je voulais absolument éviter d’écrire une pièce faisant l’apologie du bien sur le mal, ni un spectacle trop didactique, simplifiant à outrance les relations humaines en évitant les questions existentielles que se posent un bon nombre d’enfants. Au contraire, je voulais proposer une pièce avec une ligne artistique audacieuse, où l’histoire importe plus que la morale, s’éloignant des films d’animations classiques pour enfants. C’est pourquoi, j’ai placé la pièce dans un univers poétique, féerique mais sombre et j’ai placé mes protagonistes dans un état d’esprit en décalage avec leur situation tragique.
J’ai voulu rendre les personnages intemporels et universels. Pour aider les acteurs à retrouver la naïveté et la spontanéité de l’enfance qu’imposent ces deux personnages, j’ai du faire appel à un travail sur le clown.
Au niveau de l’histoire, je voulais pointer du doigt des notions que les adultes ont généralement du mal à aborder avec les enfants (la mort, la sexualité, la spiritualité,…), ainsi la pièce peut devenir le prétexte à un dialogue entre eux.
J’ai construit la pièce avec beaucoup de secrets qui sont révélés par des indices dispersés dans la narration, comme dans un jeu de piste. Pour moi, la fin de la pièce est la fin d’une escale mais pas la fin du voyage, le spectateur a tout le loisir d’imaginer la prochaine étape.
Enfin, je voulais un spectacle pour enfant où les adultes y trouvent leur compte. Le spectacle a plusieurs niveaux de lectures. Il y a la pièce que verront les enfants et celle que verront les adultes.
-Paul Emilien RIVIERE-



EXTRAIT DU TEXTE


NINO T’es réveillée ?

VENISE Ben oui !

NINO Tu as bien dormi ?

VENISE Oui, j’ai fait un rêve ! J’ai rêvé que j’étais en train de jouer avec un petit chat. Et toi ? T’as bien dormi ?

NINO J’ai fait un cauchemar. Toujours le même depuis des nuits. Nous sommes tous les deux au bord de la mer, il y a notre mère sur un bateau pas loin. Et puis petit à petit le bateau s’éloigne. Et moi je crie : Maman ! Maman ! Maman ! Et d’un coup on se fait manger par des chiens.

VENISE Nino, tu manges le dernier biscuit qui nous restait.

NINO … Tu le veux ? (elle acquiesce) Tiens !

VENISE Merci, ça tombe bien parce que j’avais un peu faim depuis tout à l’heure… (Court instant) pourquoi tu parles pas ?

NINO … Parce que je n’ai rien à dire.

VENISE Tu crois qu’il y a un paradis pour les scarabées morts ?

NINO Je ne pense pas non, enfin je n’en ai pas entendu parler.

Silence. NINO est pensif.VENISE Nino ? à quoi tu penses ?

NINO A rien. Je ne pense à rien. J’étais en train de m’imaginer ce qu’il se passe à l’orphelinat à ce moment même… Il doit y avoir la cloche qui sonne. Tous les enfants sont en train de se réveiller gentiment et tranquillement. Ils se dirigent vers le réfectoire, avec en tête de groupe Eglantine la Bouboule, dès qu’il s’agit de manger elle est toujours la première. Et maintenant ils sont assis à leur table, il y a l’odeur du chocolat chaud, et des tartines à peine grillées. Et puis, comme tous les matins il y a Monsieur Blanchard qui vient nous dire bonjour, avec ses cheveux pas encore coiffés…

VENISE Avec la tête dans le cul.

NINO Dis donc !

VENISE Bah c’est vrai le matin il est pas très joli, joli Monsieur Blanchard. C’est un peu comme toi, le matin t’es pas très joli, joli. Mais c’est pas grave hein ! Je t’aime bien quand même !

NINO Et toi te crois-tu jolie ?

VENISE Oui, moi je suis très belle.

NINO Ah bon ? c’est pas ce que m’as dit Diego Menthe à l’eau.

VENISE Il a dit quelque chose sur moi ? Quoi ?

NINO Je te le dis, si tu me dis que je suis beau aussi.

VENISE Ben non, t’es pas beau. Il t’a dit quoi ?

NINO Non, je te le dis ce qu’il m’a dit à condition que tu dises que je suis beau.

VENISE … Bon, t’es beau. Il a dit quoi ?

NINO Le plus beau frère du monde ?

VENISE Oui, le plus beau frère du monde.

NINO Du monde entier et de l’univers ?

VENISE Oui, du monde entier et de l’univers. Alors il t’a dit quoi ?

NINO … Rien. On se parle quasiment jamais lui et moi.

VENISE Pourquoi alors tu m’as dit qu’il t’avait dit quelque chose ?

NINO Pour que tu dises que je suis beau. C’était du chantage.
 

VENISE … Tu n’es qu’un agriculteur !!


NINO … un quoi ?


VENISE Un agriculteur !

NINO … Tu veux dire un manipulateur.

VENISE Oui, c’est ça.

NINO Mais c’était pour t’embêter un peu Venise.

VENISE Oui, ben c’est pas drôle !

NINO En tout cas, je vois que tu es vraiment amoureuse de ce Diego Menthe à l’eau.

VENISE … Non ! Pas du tout ! Non... Nino ? Est-ce qu’il est venu pendant la nuit ? 



NINO Qui ?

VENISE Je sais pas… Le quelqu’un qui doit venir nous chercher.

NINO Ah ! Non. Personne n’est venu.
VENISE ça se trouve il est venu pendant qu’on dormait, et qu’on l’a raté.


NINO … Mais non ! Personne n’est venu pendant qu’on dormait.


VENISE Qu’est ce que t’en sais ?


NINO Parce que la nuit c’est dangereux, on ne se balade pas la nuit. Si on doit venir nous chercher ce sera pendant le jour, pas la nuit.